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15 mai 2006

Ufanismo

Si les attaques déclenchées par le PCC(1) contre les autorités de l’État de São Paulo ont affecté toute la journée les transports publics, les éccoles et les universités, les commerces et les banques, et jusqu’aux grilles de programmes de certaines chaînes de télévision, il n’en a rien été s’agissant du rendez-vous attendu par l’immense majorité des Brésiliens.

A 11h30 pétantes, Carlos Alberto Parreira a dévoilé lors de la conférence de presse la plus suivie de l’année la liste des 23 joueurs à qui est confiée la mission de ramener la hexa, la sixième Coupe du Monde, la Copa.

Depuis quelques jours déjà, la tension est montée d’un cran. De plus en plus de voitures arborent la bannière nationale, les magasins virent au jaune et vert, les journaux publient édition spéciale sur édition spéciale, retraçant l’histoire de la Copa dans ses moindres détails, illustrée de forces graphiques et statistiques en plus des inévitables photos, mille fois vues et revues.

Aucun Brésilien n’en doute, le Brésil sera hexa. Ce qui le mettra à l’abri pour au moins douze ans de ses poursuivants immédiats, l’Italie et l’Allemagne. Comment pourrait-il en être autrement de la plus belle équipe du monde, laquelle est emmenée par le meilleur joueur du monde, Ronaldinho Gaúcho ?

Ce phénomène a un nom : ufanismo. Si le chauvinisme dérive du nom de Nicolas Chauvin, type du soldat patriote naïvement exalté des armées du premier Empire, mis en scène par Cogniard dans la Cocarde tricolore, l’ufanismo a été construit par allusion au livre du comte Afonso Celso, Por que Me Ufano do Meu País (en français, Pourquoi je suis fier de mon pays), où sont vantées les richesses et les beautés du Brésil.

Au moment où j’écris ce billet, le bilan des attaques du PCC dépasse les 80 tués, en majorité des représentants des forces de l’ordre. De toutes les guerres entre le crime organisé et les polices survenues dans le monde, peut-être est-ce celle dont le bilan est le plus lourd. Ce triste record ne pousse pas à l’ufanismo. Encore faut-il souhaiter que les responsables politiques et le peuple brésiliens s’emparent ensemble de ce drame pour en tirer, enfin, les leçons que des décennies de violence ordinaire n’ont pas permises. Et que l’ufanismo que ne manqueront pas de susciter les exploits de la Seleção ne fera pas oublier la gravité et l’urgence à répondre au défi lancé par le PCC.


(1) PCC : Primeiro Comando da Capital, faction criminelle de São Paulo disputant le contrôle du trafic de drogue.

1 commentaire:

  1. très intéressant. Bravo ! Pourquoi vous ne continuez plus à écrire ?

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