Cela aurait commencé du côté de Campos do Jordão, à deux heures de route de São Paulo, lors d’un de ces week-ends où le top de l’élite paulistana aime se retrouver entre gens du même monde. Inévitablement, les conversations auraient fini par tourner autour de la situation politique actuelle. Et, soudain, quelqu’un aurait trouvé le mot : « Cansei ».
« Cansei », cela veut dire « Je suis fatigué ». En quelques jours, sous l’impulsion du Comité des jeunes patrons de la Fédération des industries de l’État de São Paulo (FIESP), le mouvement d’humeur s’est transformé en mouvement d’opinion. Une partie de l’Ordre des avocats (OAB) s’est ralliée. Tout comme João Doria Jr, surnommé Senhor Riquinho (Monsieur le Richard). Mariée à un Brésilien, Athina Onassis en est aussi.
De quoi sont-ils fatigués ? De la corruption, de la violence, de l’impunité, de l’inaction du gouvernement, de son incompétence. Bref, de l’état des choses. Un état des choses dont ils ne sont, bien sûr, en aucune manière responsables. Car il n’y a bien évidemment aucun rapport entre leurs villas de 1200 m², leurs Mercedes blindées, leurs hélicoptères, bref leur train de vie, et ce qui se passe à leur périphérie.
Du côté du gouvernement et du PT, on crie au loup. Cansei ne représenterait que l’élite blanche. Pire encore, Cansei serait un mouvement golpiste. Le nouveau ministre de la Défense, Nelson Jobim, va devoir resserrer les rangs. Comme si la mission de rétablissement de l’ordre dans le ciel brésilien ne lui suffisait pas !
Face à ces critiques, les nouveaux fatigués rappellent que c’est le libre jeu de la démocratie que de critiquer, que le mouvement est transversal aux partis politiques, qu’il gagne les classes moyennes. Encore un peu et leurs employées de maison vont se joindre un eux. Et, pour exprimer leur fatigue, se laisser choir sur le meilleur canapé du salon de leur patron et dire qu’elles ne se remettront au travail que quand c’en sera fini de la violence dans leurs favelas, de l’impunité dont jouissent les policiers qui pactisent avec les traficants, des salaires de misère et des files d’attente dans les couloirs des hôpitaux publics !
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Sur le même sujet, lire la chronique de Fernando Canzian, qui conclut en recommandant le clip ci-dessous, où Max Gonzaga, pas encore fatigué, ironise avec énergie et talent sur les classes moyennes, cible de tous les marchés et désormais de Cansei.
03 août 2007
8 commentaires:
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Ce qu'on "oublie" de dire du côté du PT, c'est que certains de ses membres font, précisément, partie de cette "élite blanche", tellement décriée et pourrie, et ne renonce à aucun de ses privilèges, vivant, exactement, comme leur pairs, fréquantant les mêmes restaurant, voyageant en jet privés ou non, profitant, eux aussi, de leurs employés de maison et autres "babas" (nourrices), sous-payées... Une concession, peut-être? Les déclarer (ce qui leur donnera éventuellement droit à une maigre 'retraite', au lieu de les exploiter "au noir"... Quoiqu'il en soit, franchement, à part le fait que les Pétistes soient arrivés en s'auto-déclarant preux chevaliers de l'honnêteté et de la probité,défenseur des pauvres et des opprimés, pourfendeurs de la corruption (les fameuses CPI? Quelle blague!)... ils ont plutôt suivi l'exemple de leurs prédécesseurs et même raffiné certains domaines. :(
RépondreSupprimerBon WE un peu plus chaud que par ici; je l'espère pour vous!
Bonjour Francis, Je découvre ton blog après ta visite l'autre jour. Passionnat! Et hop, rajouté dans mon fil rss. Merci pour cette plume
RépondreSupprimerJussara
Le mouvement Cansei n'est qu'une parenthèse dans le mécontentement de la population brésilienne qui comprend, enfin jusqu'où peut arriver l'incompétence d'un gouvernement corrompu, indifféremment de son orientation politique, qui au départ était soit disant de gauche...
RépondreSupprimerLula à acheté son élection avec le ''bolsa familia'' dont ses élus PT ont inondé généreusement les communes du nord est avant les élections, et les fameux observateurs étrangers qui suivent les élections n'y ont vu que du feu, de toute façon ça n'est jamais que l'argent du contribuable brésilien.
Ceux qui ont financé l'élection de Lula sont en autre les banques dont les responsables, ne font certes pas parti du mouvement Cansei, leur jardinier peut être. Lula s'est considérablement enrichi depuis son élection et fait partie de la classe ''media alta'' ainsi que son fils qui n'était personne et à qui la Telemar – entreprise brésilienne - à prêté la bagatelle de 15 millions de R$ pour s'installer, sans parler du frère du président qui profite de la fonction de son frère pour faire des affaires illégales, mais ceci est une autre histoire... Félicitation pour le blog.
Dois-je comprendre que donner une petite somme d'argent contre une garantie de scolarisation effective n'a aucune portée sociale, n'est qu'un moyen "d'acheter des voix"?
RépondreSupprimerJe connais un "petit couple" (l'homme étant mon fils adoptif) qui "vit" avec 1000R$ par mois à belém, une des villes les plus chères du Brésil. Malgré leurs petits revenus et grâce à mon aide (en conseils et matérielle, limitée parce que le père met toute sa fierté à ce que sa fille ne dépende que de lui), ils apportent une attention extrême à l'éducation d'une petite fille de trois ans et reçoivent pour cela la somme fantastique de... 15 R$ par mois!
Alors c'est vraiment mépriser les Brésiliens du nord que de penser qu'on les achète avec une telle somme
Au fait: si moi j'étais brésilien, je voterais Lula "par défaut". Mon fils et sa compagne ont voté Alckmin...
Toutes les familles bénéficiaires de la Bolsa Família ne reçoivent pas 15 R$ par mois, le montant dépend de la situation de chaque famille. Pour les familles les plus pauvres, l'aide reçue va bien au-delà du 1,5% donné en exemple.
RépondreSupprimerJe n'ai certes pas mis les pieds à Belém depuis 25 ans, mais je suis très surpris de lire que Belém est une des villes les plus chères du Brésil.
Je confirme ce dernier point, la situation est due à un renchérissement des coûts de transport (route et bateau, la BR est quasiment hors d'état et le port surchargé et mal géré), à des ententes illicites et a l'incurie des pouvoirs qui renchérit tout.
RépondreSupprimerPour la bolsa de la famille en question, je crois que ce montant est calculé parce qu'ils n'ont aucune base (secteur informel)
Je souhaiterais avoir qq infos sur son mode de calcul...
Benjamin, pour en savoir plus sur le mode d'attribution de la Bolsa Família, je ne saurais mieux faire que de vous orienter vers le site du ministère qui en a la charge.
RépondreSupprimermerci pour l'information!
RépondreSupprimerErratum, je corrige, pour avoir eu Emerson au téléphone hier soir: c'était 25 R$ et pas 15