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21 juin 2006

L'éternel rappel

Les prises d’otage dans les prisons brésiliennes sont monnaie courante. Dans la plupart des cas, elles se soldent par des meurtres, d’otages ou de co-détenus, sous les yeux horrifiés des familles rassemblées au pied des murs d’enceinte. Invariablement, la police finit par envahir les pénitenciers et rétablir l’ordre quel qu’en soit le prix.

La révolte intervenue ces derniers jours dans le pénitencier de Viana, dans le grand Vitória, n’a pas échappé à cette triste habitude. Peut-être a-t-elle fait la une de la presse et de la télévision nationales parce qu’elle rappelait par trop les évènements qui ont secoué São Paulo il y a quelques semaines : le transfert des caïds dans des centres dits de haute sécurité, les ordres transmis par ces derniers aux complices en liberté, les attaques de biens publics, en l’occurence des autobus. Le gouvernement de l’Espírito Santo a fini par faire appel aux forces fédérales pour reprendre la situation en main.

Ce matin, à l’heure du petit déjeuner, un professeur de droit de l’Université Fédérale de l’Espírito Santo (UFES), Júlio Cesar Pompeu, a rappelé les conditions objectives de ces évènements : la prison école du crime, le rôle des inégalités sociales dans la génération de la violence, la responsabilité de chacun dans le maintien de cette situation.

La grande majorité des Brésiliens, a-t-il remarqué, se satisfait de ce que les prisons soient des dépotoirs et ne s’émeut pas des massacres perpétrés à l’intérieur des centres de détention.

Júlio Cesar est aussi allé un peu plus loin. Dans un pays marqué par la dictature, a-t-il souligné, il y a — et c’est particulièrement vrai dans le milieu académique — une défiance persistante envers l’État et en particulier les forces de sécurité publique. Il y a, dautre part, le refoulement, le refus d’admettre qu’il incombe à chaque citoyen d’endosser sa part de responsabilité. Au fond, les bandidos jouent le rôle de boucs émissaires. Et, pour enfoncer le clou, Júlio César n’a pas hésité à faire un parallèle entre les bandidos, des pauvres en majorité noirs, et les Juifs de l’Allemagne nazie.

Le café est-il passé de travers chez les auditeurs de TV Gazeta ce matin ? J’en doute. De même que, sur ces questions, je ne commencerai à faire crédit à mes amis brésiliens, qui ne cessent de se plaindre de la violence, que le jour où ils se mobiliseront massivement comme ils savent si bien le faire pour soutenir la Seleção.

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