Alors que circulent les rumeurs les plus folles sur Fidel, me reviennent quelques souvenirs d’un séjour que j’ai effectué à Cuba en 1982. J’étais allé là-bas tout seul, pour tenter de me faire une opinion.
J’avais pris l’avion à Madrid. À mon arrivée à l’aéroport José Marti, quelqu’un m’attendait avec une pancarte portant mon nom. L’hôtel où j’avais réservé une chambre m’avait envoyé un bus. Pour moi tout seul.
Lorsqu’on voyage, on voit ce que l’on s’attend à voir. À La Havane, les vieilles voitures américaines sans cesse retapées et briquées, les façades de style colonial, les femmes chantées par Cabrera Infante.
À la sortie de la ville, le bus avait traversé d’interminables rangées de bâtiments. Ce qu’en France on appelle des cités, des HLM. « Personne ne dort dans la rue », m’avait dit le chauffeur.
À l’hôtel, en bord de mer, tout le monde parlait français. La plupart des clients étaient québécois, une hôtesse m’avait accueilli avec l’accent québécois. Mona était un grand brin de fille, métisse de Chine et d’Afrique. Nous allions sympathiser très vite. Cela avait été mes deux premières surprises. J’ignorais que Cuba avait accueilli des migrants d’origine chinoise. Je ne m’attendais pas à discuter aussi crûment avec une personne du cru.
Mona n’avait pas froid aux yeux. Ni sa langue dans sa poche. Tantôt elle louait la révolution, tantôt elle ironisait sur elle. Ayant loué une voiture avec chauffeur, nous avions traversé l’île du nord au sud pour rejoindre la trop fameuse baie des cochons. En fait de cochons, il y avait surtout des crocodiles d’élevage. La route traversait d’immenses orangeraies. « C’est organisé, m'avait dit Mona, de telle sorte qu’il y ait des oranges arrivant à maturité toute l’année ».
Je faisais du vélo. De jolies jeunes femmes russes aussi. Leurs maris ou leurs pères, apparatchiks bien notés, ne se doutaient pas qu’il ne restait que quelques années à l’Union Soviétique. Fidel ne se doutait pas qu’il perdrait ses meilleurs alliés si vite.
Un jour, j’avais pris le bus, celui des transports en commun, pas celui de l’hôtel. Une femme avait attiré mon regard. Le rouge, de mauvaise qualité, débordait de ses lèvres. Vis-à-vis du rouge de la révolution, elle ne débordait pas d’enthousiasme. En visitant le musée des beaux-arts, j’avais découvert Wifredo Lam.
Le rhum coulait à volonté. Dès midi, des Québécois étaient ivres. Je préférais les jus de fruit disposés sur le buffet du petit déjeuner. Les repas étaient copieux, les langoustes quotidiennes pour qui aimait. Une armée de serveuses en noir et blanc était à notre service. Dans l’ascenseur, une employée était à la manoeuvre. Les restes leur étaient destinés.
Au bout du voyage, je m’étais fait une opinion. Pour les touristes, le bilan était globalement positif. Pour les Cubains, c’était une autre histoire...
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