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16 janvier 2008

L’oracle de la nouvelle Delphes

Ces deux derniers jours, lundi 14 et mardi 15, apparaîtront-ils dans le futur comme deux jours importants de l’Histoire de l’Amérique latine ? Fidel et Lula veulent le croire.

Bien que cela ne le concerne que de loin, le fait est que cela a commencé au Guatemala, à l’occasion des cérémonies d’investiture du nouveau président de ce pays, Álvaro Colom. Pour la première fois depuis la crise provoquée par l’opération Emmanuel, Uribe et Chávez se sont trouvés à quelques mètres l’un de l’autre. Fidèle à sa ligne politique, et plus encore à son tempérament, Lula n’a pas manqué de se poser en arbitre, et qui plus est en arbitre qui veut être aimé par tous les protagonistes. On l’a d’abord vu s’entretenir longuement avec Chávez, puis se diriger vers Uribe. Et, de Cuba où il arrivait le soir même, le message est sorti : « Arrêtez de vous faire la gueule ! [] Quand on assume le rôle de Chef de l’État, on doit penser à l’intérêt général et jamais à ses intérêts personnels. Je pense que c’est cela que doivent avoir en tête Chávez et Uribe. »

Lula semble avoir été entendu puisque les présidents colombien et vénézuélien ont, dans les heures qui suivaient, fait des déclarations allant dans le sens demandé. Reste à transformer dans les faits ces paroles et, surtout, ne pas tout foutre en l’air avec l’un de ces discours à l’emporte-pièce auxquelles tant Uribe que Chávez ont l’habitude de recourir pour électriser les foules.

Mais ces discussions n’étaient qu’un hors-d’oeuvre en comparaison de ce qui s’est joué à La Havane. Même si le programme officiel de la visite d’État de Lula à Cuba ne mentionnait pas de rencontre avec Fidel, on imaginait bien qu’elle aurait lieu, à l’heure où le décideraient l’oracle de la nouvelle Delphes et ses services de sécurité. Et l’on n’a pas été déçu.

« Nous avons parlé deux heures et demie », a révélé un Lula plus enthousiaste que jamais, avant de préciser, d’un air entendu : « Lui deux heures, et moi une demi-heure seulement. » Il fallait bien en effet deux heures au moins pour permettre à Fidel de détailler sa vision de l’avenir de l’Amérique latine. En substance, le message est le suivant : jamais les prix alimentaires n’ont été aussi élevés depuis bientôt deux siècles et ils vont continuer de s’apprécier ; dans ce contexte, favorisé par les Dieux, le Brésil (allié à l’Argentine) a un rôle de premier plan à jouer, celui de nourrir l’ensemble de l’Amérique latine, y compris le Mexique qui ne peut compter sur son impérial voisin.

Une fois l’oracle consulté, la teneur des accords signés entre les deux pays ne manquait pas de sel. Déjà fournisseur en aliments de Cuba depuis de longues années, le Brésil a renouvelé et augmenté les prêts consentis à cette fin par sa Banque nationale de développement économique et social (BNDES) : 200 millions de dollars supplémentaires.

Une Amérique latine qui carbure au pétrole vénézuélien et qui se nourrit d’aliments importés du Brésil et d’Argentine, voilà la mondialisation rêvée par Fidel et approuvée par Lula. Les automobilistes étatsuniens et les bouches affamées de Chine peuvent trembler !

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