Pages

28 mars 2012

Encore une belle journée

Encore une belle journée qui s’annonce. Il ne pleuvra pas. La météo nous annonce trente-quatre degrés. Le soir, alors que les fatigues se seront accumulées, il ferait bon s’installer à une terrasse. Mais il est peu probable que nous sortions ce soir. Nous sommes à court d'imagination. Et puis l’argent fait défaut. Pour l’heure, j’ai de l’énergie, je vais d’un bon pas, rattrape la plupart de ceux qui me précèdent, fais même quelques foulées pour me tester. La carcasse semble tenir.

Il y a assise sur un banc, à l’ombre, une jeune femme, en chemise et jean gris. Une frêle jeune femme, le visage fermé, que je vois souvent assise là, attendant je ne sais quoi, je ne sais qui. Ses longs cheveux forment une natte rejetée dans son dos. Qu’en sera-t-il d’elle d’ici trente ou quarante ans ? Sans doute sera-t-elle toujours là. Il m’arrive, voyant de jeunes personnes, de les imaginer vieilles, comme il m’arrive de m’imaginer le corps mort, attendant d’être livré au feu ou descendu en terre.

En attendant, je marche avec dans les poches ma carte d’assurance santé et mon portable. Pour le cas où une nouvelle crise viendrait à se produire. Pour faciliter le tri : les hôpitaux gratuits pour tous, sans garantie d’être soigné dans les meilleurs délais ; les cliniques privées parfaitement équipées pour ceux qui ont de quoi payer. Nous n’avons pas beaucoup d’argent, mais nous avons fait de notre santé une priorité. À dire vrai, elle plus que moi.

Nous appartenons à la première génération où la part des dépenses de santé dépasse tous les autres postes de dépense. Est-ce bien raisonnable alors que nous serons bientôt deux cent millions ici, sept milliards sur la planète ? Je me pose la question de temps en temps, mais ce matin, merde, j’ai encore envie de vivre. Un avion, qui vient de contourner la ville, a entamé la procédure d’approche de l’aéroport. Me reviennent les images des voyages qui m’ont amené ici, qui m’ont chaque fois émerveillé : les montagnes environnantes aux formes fantasques, les quartiers que j’ai plaisir à reconnaître, les dizaines de cargos qui attendent de charger, l’île enserrée entre mer et continent, le troisième pont long de trois kilomètres, ceux franchissant le chenal tout petits, la mangrove verte qui résiste encore à l’urbanisation. Il faut voir la région du ciel pour en comprendre l’étrange géographie. Je voudrais être dans cet avion. Il y a maintenant longtemps que nous n’avons pas voyagé. Y aura-t-il encore un autre voyage ?

Photo (c) PixeLuz / Francis Juif

3 commentaires:

  1. Des pensées qui s'entremêlent et où le lecteur, parfois se lit...
    GB

    RépondreSupprimer
  2. Bonjour Francis,

    Je pensais la même chose. Et puis, tu l'as si bien dit: vivre! Toujours un plaisir que de te lire.

    Loula

    RépondreSupprimer
  3. Je te souhaite d'autres voyages. De ceux qui font renaître.

    Lorsqu’on arrive dans une contrée nouvelle, le goût de la découverte s’estompe avec la curiosité. Est-ce une métaphore de l’amour ? Je ne saurais y répondre.

    Je sais seulement que nous devons relever ce défi jusqu’au dernier souffle.

    Celui qui consiste à renouveler sans cesse notre regard sur les choses.

    Merci de partager cette expérience.

    RépondreSupprimer

Pour vous aider à publier votre commentaire, voici la marche à suivre :
1) Écrivez votre texte dans le formulaire de saisie ci-dessus ;
2) Si vous avez un compte, vous pouvez vous identifier dans la liste déroulante "Commentaire" ;
Sinon, vous pouvez saisir votre nom ou pseudo par Nom/URL ;
3) Vous pouvez, en cliquant sur le lien "S'abonner par e-mail", être assuré d'être avisé en cas d'une réponse ;
4) Cliquer sur Publier enfin.

Et parce que vos commentaires nous intéressent, merci de prendre la peine de nous faire part de vos opinions et de compléter ce billet par vos informations !

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...