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25 août 2007

Chantez cigales, tambourinez termites!

C’était en 1949, une paillette à l’échelle de ces terres, une poutre à l’échelle de l’homme, lui qui s’apprête à passer la main, chantez cigales, tambourinez termites... C’était ce mois-ci, précisément entre le 5 et le 7 août. Cela se passait, cela se passe à Iguape, petite cité du littoral paulista.

« La foule qui défile le long d’une rue étroite, la remplissant entièrement, est sans aucun doute le rassemblement le plus étrange que l’on puisse rencontrer. Les âges, les races, les couleurs des vêtements, les classes sociales, les maladies, tout se mélange dans une masse vibrante et colorée, illuminée par les cierges, au-dessus desquels explosent sans cesse les feux d’artifice et où passe aussi, de temps à autre, un avion, insolite dans ce monde intemporel. »

Les maladies, les sangs mêlés ont décidément frappé Albert Camus. Est-ce que cela a à voir avec un compte mal réglé, avec le meurtre de l’Arabe par Meursault?

C’est Oswald de Andrade qui a entraîné Camus à Iguape. Le motif ? La procession de Bom Jesus. Camus en tirera une nouvelle, La pierre qui pousse, où il mettra en scène un double de lui-même, l’ingénieur français D’Arrast, un autre double, un autre Étranger.

« Cette terre était trop grande, les sangs et les saisons se confondaient, le temps se liquéfiait. »

Albert recycle les mots de son journal de voyage. Procédé classique. À quoi servent les carnets de croquis des peintres ?

« Là en Europe, il y avait la honte et la colère. Ici, l’exil ou la solitude, au milieu de ces fous lascifs et trépidants, qui dansaient pour mourir. »

Il n’était pas à l’aise, notre Albert. Il regardait ça de l’extérieur, mais il ne pouvait s’empêcher de regarder. La fascination avait été à ce point puissante qu’il en avait fait le récit et qu’il avait voulu faire de ce récit un conte moral.

L’hôpital Bon Souvenir — en voilà un drôle de nom pour un hôpital ! — avait hébergé Camus et son double, l’ingénieur français, amateur d’échecs comme le docteur B., le vainqueur de Czentovic, je le parierais volontiers. L’hôpital n’était plus qu’un bon souvenir, celui du passage d’un futur Nobel de littérature dans la petite cité d’Iguape. Il est aujourd’hui en ruine, livré aux vaches qui paissent en paix dans les allées, chantez cigales, tambourinez termites...

Plus l’enquête avance, plus elle piétine. Chaque information glanée soulève dix questions nouvelles. Pourquoi diable Albert a-t-il été hébergé à l’hôpital et non pas dans un hôtel ? Serait-ce en rapport avec les références constantes aux maladies, aux sangs mêlés ? Fallait-il que cette mélancolie, qui l’a accablé tout au long de son séjour brésilien, soit soignée dans un lit d’hôpital ?

Et ce n’est pas ce que Camus confie au livre d’or de l’établissement qui va nous aider : « À l’hôpital Feliz Lembrança, qui porte si bien son nom, en hommage chaleureux à ce Brésil qui a aboli la peine de mort et à cette ville d’Iguape où l’on comprend ce geste. »

Ce geste, celui de relever l’abolition de la peine de mort, je ne le comprends pas. Et c’est ça qui me plaît, qui m’intrigue et qui me donne envie d’en savoir plus. Chantez cigales, tambourinez termites !

4 commentaires:

  1. Cette abolition, c'était un des combats militants de Camus, révolté par les guillotinages à la chaîne commis dans son Algérie natale - pires selon lui encore que les "corvées de bois" (exécution sommaires) parce qu'entachées de légalité...

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  2. Certes, mais cette allusion à la peine de mort, dans le livre d'or d'un hôpital, je trouve cela bien étrange...

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  3. Il y avait des tas d'obsessions chez Camus, qui "ne tournait pas toujours bien rond" de l'aveu même de son ami J Daniel

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  4. Livre commandé!

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