Il y a belle
lurette que je ne lis plus la chronique dominicale de Ferreira Gullar
dans la Folha de São Paulo. Vieux réac aigri, il appartient
à la catégorie des communistes repentis : les pires entre les
intellectuels ! Et, surtout, sa chronique est devenue le
vomitoire de ses ruminations indigestes, le défouloir de rancœurs à
n'en plus finir. Mais il y a eu un autre Ferreira Gullar, celui du
« Poema Sujo », à qui je dois, suite à un nombre
incalculable de ricochets du destin, de vivre ici.
Un de mes textes de
jeunesse ayant été publié dans une revue française (Prisme)
à côté de la traduction du Poema Sujo, j'avais été amené
à rencontrer le traducteur (Gilbert Chaudanne) à Teresina,
lointaine capitale du Piauí, lors de mon premier voyage au Brésil.
Et de fil en aiguille, un fil tissé au long des années, la
tarentule avait fini par atterrir à Vitória, pour le meilleur et
pour le pire.
Ce dernier dimanche, j'ai lu
Ferreira Gullar. Et si j'ai fait exception, c'est qu'il y ait
question de son nom. Donc de mon nom. Cette fois, le grantécrivain y
rumine d'abord son vrai nom, que personne ne respecte. Ainsi
les talons de ses chèques portent le nom de José Ribamar Ferreira
au lieu de José de Ribamar Ferreira... Il y rumine ses noms de
militant entré dans la clandestinité. Il y rumine ses noms
d'auteur, à commencer celui par lequel nous le connaissons, le
Gullar étant une déformation du par trop commun Goulart, hérité
de sa mère.
Je suis resté sur
ma faim. Mais j'ai aimé ce qui suit :
L'autre jour […], des jeunes s'approchent de moi.
– C'est Goulart de Andrade !– Pas du tout. C'est Paulo Goulart !C'est pour ça que quand quelqu'un me demande si je suis le poète Ferreira Gullar, je réponds : « Parfois ».
Sacrée vieille
canaille ! Si je te croise sur l'avenue Atlântica, je
reconnaîtrai sans aucun doute ta gueule, puisque tu es de
ceux, assez rares, qui ont une gueule. Je ne te demanderai pas
si tu es le poète, je t'inviterai direct à boire un verre, une
cachaça si tu peux encore, et je te raconterai mon nom. Tu verras,
tu arrêteras de te plaindre de ton nom !
Votre chute est savoureuse ;.)
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