Zizi Possi était hier soir la tête d’affiche du concert de Noël. Haut comme quatre étages des immeubles qui bordent le front de mer, un demi dôme, un coquillage selon les poètes de la Gazeta, a été installé sur la plage aux frais de la CST. Merci Monsieur Mittal de n’avoir pas taillé dans les budgets !
Les musiciens de l’orchestre philarmonique de l’Espírito Santo occupent un niveau de l’édifice, quatre-vingt choristes en pantalon blanc et veste bleu ciel sont alignés, comme à la parade, sur des passerelles au-dessus des musiciens. Le programme alterne les airs de circonstance, Stille Nacht, Glória de WAM, Jingle Bells, Aleluia de LVB, Gesú Bambino, Glória de AV, jusqu'à Greensleaves qui clôture la première partie.
Les quatre-vingt choristes se séparent en deux groupes, chacun se plaçant d’un côté des passerelles, pour laisser s’installer au coeur de la structure le choeur des enfants, cent-trente filles et garçons, en pantalon blanc et veste jaune.
Et c’est Aquarela do Brasil, composée une nuit de 1939 par Ary Barroso, coincé chez lui par une tempête qui l’empêchait de sortir. À quoi tiennent les coups de génie ? Des coups de tonnerre dans le ciel ! Aquarela do Brasil est l’hymne véritable du Brésil, terra do samba e do pandeiro. Il faut les voir s’exalter, ces enfants qui se balancent, ces sources murmurantes qui nous abreuvent de leur samba national. Il faut voir leurs visages en gros plan, sur les écrans géants qui jalonnent la plage, il faut les voir livrer leur coeur pour chanter cette ode au Brésil brésilien, qui loue un Brésil idéal, multicolore et fraternel, Terre de Notre Seigneur, le Brésil indépassable de l’âme brésilienne. Le rythme, la mélodie, les vers, tout entraîne vers les rivages d’un vert paradis qu’incarnent ces enfants embarqués dans un coquillage volant. Il faut se laisser emporter vers cet idéal dans lequel ils se reconnaissent, eux dont l’âme découle du moule de l’âme collective qui les a façonnés. Nous sommes des milliers à laisser frémir la chair de poule de nos épidermes hérités de l’Italie du Frioul et de la Vénétie, de l’Allemagne de la Poméranie, de l’Espagne des Asturies, du Portugal de derrière les montagnes, des vastes plaines de l’Ukraine et des îles du Japon, des déserts de Syrie et des côtes du Liban, de l’Afrique du golfe du Bénin et de l’Angola. Et même de France. Nous sommes cette aquarelle du Brésil, jamais plus belle que quand elle fait la fête.
En chemin, je parlais avec J., la nièce de mon épouse, de ma découverte de Zizi Possi. C’était à Paris, il y a vingt ans. J’avais écouté chez un disquaire, un disquaire qui a inauguré son sixième magasin au Brésil il y a quelques semaines même s’il ne vend plus beaucoup de disques, j’avais écouté le disque d’une chanteuse qui m’était inconnue. Et j’avais su, après quelques mesures, que ce serait elle, ma chanteuse, pour toujours. La voici qui se présente sur la scène. J. et moi étions d’accord, sa version de la chanson de Gil, A Paz, est de ce ces évidences face auxquelles on rend toute arme critique pour se laisser inonder par l’appel à la paix, au bonheur, à la vie. Et par quoi commence-t-elle, Zizi ? Les lignes de basse qui débutent A Paz font trembler le sol de sable de la plage. N’est-il pas question d’Hiroshima, de cette contradiction d’une bombe apportant la paix ?
Comme la majorité des Capixabas sont italiens d’origine, Zizi Possi, la Paulista d’origine italienne se sent un peu chez elle et nous propose une sélection de canzonette : Passione, Chella Llá, Torna a Sorriente, Per Amore.
Son récital sera bref, trop bref hélas. Vient déjà le moment où elle annonce la dernière chanson, écrite par « un ami, disparu ». O que é, o que é est de ces hymnes à l’amour, à la vie, au bonheur qui fait pousser des ailes. Et l’on s’envole, des cumulus bas couronnent la baie de Camburi au-dessus des navires qui attendent leur tour d’être chargés, les étoiles apparaissent soudain plus nombreuses, ces étoiles que j’observais, enfant, avec papa lorsque nous marchions autour de minuit à travers champs. Qui n’a jamais entendu une plage entière reprendre les vers de Gonzaguinha ne sait pas ce que c’est que communier !
Viver, e não ter a vergonha de ser felizIl y a deux milles ans environ, naissait le rabbin Ieschoua qui allait donner espoir aux générations qui suivraient. Gonzaguinha était une figure christique, un saint et un pécheur.
Cantar (e cantar e cantar) a beleza de ser um eterno aprendiz
eu sei que a vida devia ser bem melhor e será
mas isso não impede que eu repita
é bonita, é bonita e é bonita.
Après Zizi Possi transcendant le message qu’il nous a légué, après Zizi reprenant en bis A Paz, la foule se disperse doucement, sereinement.
Un peu plus loin sur la plage, est dressé un chapiteau qui abrite les stands d’associations prônant une économie solidaire. C’est une ruche où il ne reste plus qu’à faire notre miel.
Há quem fale que a vida da gente
é um nada no mundo
é uma gota, é um tempo
que finda num segundo,
há quem fale que é um divino
mistério profundo
é o sopro do Criador
numa atitude repleta de amor
você diz que é luta e prazer;
ele diz que a vida é viver;
ela diz que o melhor é morrer,
pois amada não é
e o verbo sofrer.
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